LE JARDIN DE CHOUI ET LEIA

LE JARDIN DE CHOUI ET LEIA

L'invasion est en cours

Depuis quelques années, nous observons notre jardin.

Grâce à nos techniques permaculturelles, nous espérons y préserver la biodiversité.

Cela est très certainement un vœu pieux.

En fait, il nous est parfaitement impossible de déterminer, en l'absence de référence, si nous sommes efficaces.

Comment comparer?

Avec quoi?

Certaines espèces rencontrées sont-elles rares?

Certaines sont-elles en danger?

Certaines étaient-elles absentes et avons-nous permis leur retour? Etc.

Beaucoup de questions, peu de réponses.

Tout ce dont nous pouvons être sûr, c'est que nous voyons des insectes sur nos fleurs.

 

Abeille et éristale sur des fleurs de laurier-tin:

 

IMG_1814 (2).JPG
 

A côté des espèces autochtones, nous rencontrons aussi chez nous un certain nombre d'espèces "exotiques".

Pour l'instant, elles restent très minoritaires.

Mais que font-elles ici?

Certaines d'entre elles sont connues.

Et semblent générer des préoccupations d'ordre écologique.

Nous n'avons rien constaté d'inquiétant, à ce jour, dans notre jardin.

Un vrai danger existe-t-il?

N'est-il pas encore trop tôt pour en juger?

N'adoptons-nous pas à leur égard un regard anthropomorphique?

Qui nous les fait redouter comme nous redoutons les migrants?

D'autres questions, et toujours aussi peu de réponses.

 

Quelques-unes des espèces "exotiques" que nous avons rencontrées sont arrivées en France par le "transatlantique".

La multiplication des échanges avec le continent américain ne nous a pas amené que Gershwin et le Coca-Cola.

Il y eut aussi des insectes.

L'isodonte mexicaine en est un exemple.

C'est est un sphex très répandu en Amérique du nord.

Il apparut en Europe au début des années 60.

Isodontia mexicana (3) (isodonte mexicaine):

 

SPHECIDAE Isodontia mexicana 9.JPG

 

Quel est son impact sur nos écosystèmes depuis son introduction?

Quasiment nul, à l'exception du fait qu'il concurrence son homologue européen dont la population semble avoir sensiblement baissé.

Les deux espèces sont anatomiquement très proches.

Isodontia paludosa (2):

 

SPHECIDAE Isodontia paludosa 1.JPG
 

Le pétiole de l'espèce américaine est cependant beaucoup plus fin.

Isodontia mexicana (3) (isodonte mexicaine):

 

SPHECIDAE Isodontia mexicana 7.JPG

 

La punaise américaine, comme son nom l'indique, a été, elle-aussi, importée d'Amérique du nord.

Elle est présente en France depuis la fin des années 90.

Leptoglossus occidentalis (3) (punaise américaine):

 

COREIDAE Leptoglossus occidentalis 2.JPG

 

Il s'agit d'une espèce réputée invasive.

Ce qui ne veut pas dire grand chose, en dehors du fait qu'elle se développe un peu partout en Europe.

Sans doute au détriment des autres espèces de punaises.

Mais, pour l'instant, il n'y a pas d'argument étayant ce fait.

En dehors de cela, il s'agit d'une espèce strictement inoffensive.

L'hiver, elle recherche volontiers l'abri des maisons pour se protéger.

Leptoglossus occidentalis (3) (punaise américaine):

 

COREIDAE Leptoglossus occidentalis 1 (punaise américaine).JPG

 

Par contre, la chrysomèle américaine, elle, n'est pas originaire d'Amérique mais d'Afrique du nord.

Il semblerait qu'elle ait été nommée ainsi par erreur.

Devenue très répandue, elle remonte progressivement du sud vers le nord.

Chrysolina americana (3) (chrysomèle du romarin):

 

CHRYSOMELIDAE Chrysolina americana 2.JPG

 

En général, les espèces américaines importées ont fait assez peu parler d'elles.

Celles citées plus haut, qui ont pourtant mauvaise réputation, ne semblent avoir conditionné la survenue d'aucun désastre majeur.

 

Il est deux espèces importées d'Amérique qui firent cependant le buzz.

La première est la cicadelle blanche.

Importées dans les années 80, sa présence en France avait été présentée comme une catastrophe.

En fait, il ne s'est rien passé.

Metcalfa pruinosa (3) (cicadelle blanche):

 

FLATIDAE Metcalfa pruinosa 3.JPG

 

Mieux, elle s'est avérée utile car elle produit un miellat dont les abeilles sont friandes.

Lesquelles fabriquent du miel de cicadelle blanche.

 

Actuellement, c'est plutôt le sphinx du palmier, qui vient d'Amérique du sud, qui est redouté.

Il sévit depuis 2006 et on nous promet une véritable hécatombe.

Nous sommes prêt à parier que pas grand chose ne va se produire.

Paysandisia archon (3) (sphinx du palmier):

 

CASTNIIDAE Paysandisia archon 1 (sphinx du palmier).JPG

 

Les palmiers finiront sans doute par s’adapter.

N'oublions pas qu'ils sont eux-mêmes des espèces exotiques qui ont été importées.

Vous noterez, au passage, que la cicadelle blanche n'est pas une cicadelle.

Pas plus que le sphinx du palmier n'est un sphinx.

La première appartient à la famille des Flatidae, et non pas à celle des Cicadellidae.

Le second à celle des Castniidae, et non pas à celle des Sphingidae.

Aucun représentant des deux familles n'était présent en Europe avant leur importation.

Nous leur avons attribué des noms vernaculaires "approximatifs".

 

Les insectes d'origine asiatique semblent nous inquiéter plus que les américaines.

Que redoute-t'on de la part de ces espèces asiatiques réputées invasives?

 

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(droits réservés)

 

La coccinelle asiatique, importée en Europe dans le cadre de la lutte biologique, devait, a priori, être "utile".

Il s'avère qu'elle concurrence les coccinelles autochtones, logiquement d'ailleurs, puisqu'elles partagent la même niche écologique.

Harmonia axyridis (3) (coccinelle asiatique):

 

COCCINELLIDAE Harmonia axyridis 8.JPG

 

Dans notre jardin, à côté de la coccinelle asiatique, nous avons rencontré une dizaine d'espèces différentes de coccinelles.

La plus répandue, pour l'instant, reste la coccinelle à sept points.

Coccinella septumpunctata (3) (coccinelle à sept points):

 

COCCINELLIDAE Coccinella septempunctata 7.JPG

 

Dans la mesure où il y a, chez nous, de quoi becqueter pour tout le monde, il est peu probable que la pression de sélection se fasse beaucoup sentir.

En effet, nous ne traitons pas les pucerons.

Nous ne traitons rien d'ailleurs.

Nous laissons faire les prédateurs naturels.

Peut être sommes-nous optimistes sur ce point?

 

Une autre espèce, venue d'Asie, par ses propres moyens celle-là, est aussi réputée entrer en concurrence avec les espèces autochtones.

Il s'agit de Megachile sculpturalis.

Cette mégachile, plus grosse que les espèces européennes, semble occuper leurs habitats.

Megachile sculpturalis (3):

 

MEGACHILIDAE Megachile sculpturalis 3.JPG

 

Il est d'ailleurs conseillé, à ce sujet, de disposer d'hôtels à osmies à plus petites cellules.

L'espèce asiatique, plus grosse, ne pourra pas les occuper et laissera la place aux autres.

 

Personnellement, nous apprécions Megachile sculpturalis pour une raison simple.

Contrairement aux autres espèces de la famille des Megachilidae (il existe quelques exceptions), elle est facile à reconnaître.

Pour l'instant, nous rencontrons toujours de nombreuses et variées espèces de Megachilidae chez nous.

Hélas plus difficiles à déterminer.

En voici quelques exemples rencontrés récemment:

Hoplitis cristatulla (2):

 

MEGACHILIDAE Hoplitis cristatula 2.JPG
 

Lithurgus chrysurus (1):

 

MEGACHILIDAE Lithurgus chrysurus 3.JPG

 

Hoplitis adunca (1):

 

MEGACHILIDAE Hoplitis adunca 3.JPG
 

D'autres espèces asiatiques sont redoutées à cause des plantes qu'elles parasitent.

Évidemment, une espèce d'insecte ne choisit pas son hôte.

Ses caractéristiques font qu'elle va se développer au détriment de ceci plutôt que de cela.

Dans la nature, les cibles, qu'elles soient végétales ou animales, s'adaptent à la présence de leurs parasites et prédateurs.

Elles apprennent à s'en défendre et des équilibres, obligatoires, se créent.

Lorsqu'une espèce, normalement non confrontée à un parasite lambda, le rencontre, elle est en difficulté.

Cela est vieux comme le monde.

Cela fut le cas pour les pommes de terre avec le doryphore, pour la vigne avec le phylloxera, etc.

 

Actuellement, ce sont les buis qui sont menacés.

Par un papillon venu d'Asie.

Cydalima perspectalis (3) (pyrale du buis):

 

CRAMBIDAE Cydalima perspectalis 1 (pyrale du buis).JPG
 

Dommage, il est assez joli.

Nous verrons bien ce qu'il adviendra.

Gageons que les buis finiront par trouver des modes de défenses et ne disparaîtront pas.

A côté des phénomènes évolutifs et des grandes catastrophes naturelles, une seule espèce vivante est, pour l'instant, parvenue à en éradiquer une autre: l'homme.

 

Une autre espèce asiatique inquiète: la punaise diabolique.

Diabolique! Rien que çà.

Horreur, nous sommes foutus: la punaise diabolique est présente dans le jardin de Choui et Leia!

Halyomorpha halys (3) (punaise diabolique):

 

PENTATOMIDAE Halyomorpha halys 1.JPG
 

Nous ne voyons d'autre issue qu'un exorcisme.

 

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(droits réservés)

 

Plus sérieusement, nous avons la sensation qu'il n'y a guère de raisons de s'inquiéter.

Nous avons rencontré 55 espèces de punaises différentes à ce jour dans le jardin de Choui et Leia.

Et il semble bien qu'il ne s'en porte pas plus mal.

La punaise diabolique a très mauvaise réputation parce qu’elle s'attaque aux arbres fruitiers.

Elle est strictement inoffensive pour l'homme.

Halyomorpha halys (3) (punaise diabolique):

 

PENTATOMIDAE Halyomorpha halys 2.JPG

 

Ses prédateurs et parasites sont multiples: oiseaux, crapauds, mantes, araignées, mouches, et même d'autres punaises...

Foutons la paix à ceux-ci et gageons que celle-là ne pullulera pas.

 

Enfin, le pire du pire: le frelon asiatique.

Lui, il associe toutes les tares.

D'abord, il concurrence le frelon européen.

Vespa crabro (3) (frelon européen):

 

VESPIDAE Vespa crabro 8.JPG

 

Ensuite, il bouffe les abeilles.

Apis mellifera (3) (abeille domestique):

 

APIDAE Apis mellifera 7.JPG

 

Enfin, il tue les gens!!!

Au moins trois personnes sont décédées piquées par des frelons asiatiques cette année.

Il faut, en fait, relativiser (voir article "pourriture de guêpes").

15000 personnes meurent par an en France d'accidents domestiques uniquement dans les cuisines.

Et l'on n'en parle jamais.

 

Jusque là, nous n'avions jamais rencontré de frelon asiatique dans le jardin de Choui et Leia.

Cette année, il y en a!

En plus, cette espèce est vraiment une saloperie.

Nous n'avons réussi à la prendre en photo qu'en train de bouffer la gamelle du chat.

Ce qui ne fournit pas un cliché extrêmement esthétique.

Vespa velutina (3) (frelon asiatique):

 

VESPIDAE Vespa velutina 2 (2).JPG
 

En fait, l'Eurasie ne forme qu'un seul bloc continental.

La présence des espèces asiatiques en France parait beaucoup plus logique que celle des espèces américaines.

Ces transferts d'espèces sont évidemment en grande partie liés au développement des communications.

On peut considérer cela comme dommage, voire dommageable.

Ce phénomène n'en est pas moins inéluctable.

Peut-on imaginer l'espèce humaine restant sagement cantonnée dans ses lieux d'origine?

Comment la contraindre?

 

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(droits réservés)

 

Faut-il s'inquiéter de tout cela?

Rien n'est moins certain.

Depuis la nuit des temps, des super-prédateurs mangent des prédateurs plus petits.

 

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(droits réservés)

 

Eux mêmes se nourrissent d'autres prédateurs, et ainsi de suite.

 

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(droits réservés)

 

Chez les mammifères, nous avons tendance à différencier les herbivores des carnivores.

Cela n'a pas beaucoup de sens.

Les herbivores mangent, eux-aussi, des êtres vivants: les plantes.

Lesquelles sont situées en bas des chaines alimentaires.

Tous ces êtres vivants s'adaptent les uns aux autres.

Quand la rencontre est brutale, cela implique des dégâts.

Mais, toujours, les victimes finissent par développer des modes de défense et s'adaptent à la présence de leurs prédateurs.

Par contre, il est beaucoup plus difficile de s'adapter à cela:

 

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(droits réservés)

 

A côté des translations sur un axe Est-Ouest, il existe aussi des translations du Sud vers le Nord.

Certaines sont liées aux communications humaines.

Par exemple, le papillon "brun des pélargoniums", originaire d'Afrique du sud, a suivi l'importation des géraniums.

Cacyreus marshalli (3) (brun des pélargoniums):

 

LYCAENIDAE Cacyreus marshalli 6 (brun des pelargoniums).JPG

 

D'autres n'ont aucun lien avec les communications humaines.

Elles sont liées au réchauffement climatique.

Nous avons plus haut évoqué la chrysomèle américaine, qui n'est pas américaine.

Elle vient en fait d'Afrique de nord, et monte tranquillement vers le nord de la France.

Chrysolina americana (3) (chrysomèle du romarin):

 

CHRYSOMELIDAE Chrysolina americana 3.JPG

 

De nombreuses autres espèces sont concernées.

C'est le cas pour le criquet italien, qui a été aperçu jusqu'en Bourgogne en période de canicule.

Calliptamus italicus (2) (criquet italien):

 

ACRIDIDAE Calliptamus italicus 1.JPG

C'est aussi le cas pour la decticelle varoise, qui est remontée jusqu'en Vendée.

Rhacocleis poneli (3) (decticelle varoise):

 

TETTIGONIDAE Rhacocleis poneli 1 (decticelle varoise).JPG

 

Il est d'autres exemples.

En ce qui nous concerne, situés comme nous le sommes dans le sud de la France, les hébergés climatiques, du coup, devraient venir des péninsules italienne, ibérique, ou du Maghreb.

 

Les espèces suivantes progressent du sud vers le nord à partir d'Espagne et d'Italie.

Platycnemis latipes (3) (agrion blanchâtre):

 

PLATYCNEMIDAE Platycnemis latipes 4 (agrion blanchâtre mâle).JPG

 

Eupholidoptera chabrieri (3) (pholidoptère splendide):

 

TETTIGONIIDAE Eupholidoptera chabrieri 2 (pholidoptère splendide).JPG
 

Le criquet égyptien s'est développé vers les régions septentrionales à partir d'Afrique du nord.

Anacridium aegyptium (3) (criquet égyptien):

 

ACRIDIDAE Anacridium aegyptium 3.JPG

 

De même que le criquet de Jago.

Dociostaurus jagoi (2) (criquet de Jago):

 

ACRIDIDAE Dociostaurus jagoi 1 (criquet de Jago).JPG

 

Nous avons déjà évoqué dans un autre article (la marguerite et les butineurs, deuxième épisode) le cas du Bombylosoma.

Ce genre, appartenant à la famille des bombyles, semble très présent dans le jardin.

Normalement, ces insectes se rencontrent en Égypte et dans le Maghreb.

Bombylosoma sp. (3):

 

BOMBYLIIDAE Bombylosoma sp. 1.JPG

 

Donc, il semble bel et bien que certains insectes, réfugiés climatiques, pointent leur nez chez nous.

Les insectes qui se promènent d'Est en Ouest, finalement, tournent en rond.

A l'inverse, les insectes qui remontent vers le nord seront automatiquement coincés, un jour ou l'autre, par les limites de la planète.

Ce ne sont pas les insectes eux-mêmes qui doivent nous inquiéter.

Ce qui doit nous préoccuper est le réchauffement climatique en cours.

Le jour où l'on croisera des criquets égyptiens au Groenland, la planète aura sacrément changé de visage.

Des hommes seront-ils encore présents pour s'en soucier?

 

Les avis restent partagés sur la question du réchauffement climatique.

Du moins sur ses causes.

Parmi les climato-sceptiques, il en est au moins un qui donne à réfléchir.

 

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Mais, quelles que soient les causes, les conséquences sont les mêmes.

Les insectes essaient de s'y adapter.

Les humains y parviendront-ils?

D'autres que nous le sauront.

 



21/10/2018
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