Couleur: bleu
Lorsque le temps est beau, le ciel est bleu.
Ceci parait être une évidence.
En fait, pourquoi le ciel est-il bleu?
Il l'est parce que l'atmosphère terrestre est essentiellement composée d'air.
Les molécules d'air se comportent de manière à ne laisser passer que certaines longueurs d'onde.
Celles qui correspondent à la couleur bleue.
Alors qu'elles réfléchissent les autres.
Donc, le ciel est bleu.
Par conséquence, la mer l'est aussi, car elle est le miroir du ciel.
A part cela, le bleu est une couleur assez rare dans la nature.
Plusieurs fleurs, cependant, sont bleues.
Nigella damascena (3) (nigelle de Damas):
Mais elles sont beaucoup plus discrètes que les fleurs rouges.
Borago officinalis (3) (bourrache):
Obligatoirement, car le rouge étant la couleur complémentaire du vert, et le vert la couleur principale du monde végétal, des fleurs rouges, cela se voit.
Alors qu'une fleur bleue, cela se devine à peine.
Vinca minor (3) (petite pervenche):
Pour se faire "remarquer", certaines fleurs bleues glissent discrètement vers le violet.
Platycodon grandiflorus (3) (campanule à grandes fleurs):
D'autres forment des bandes.
Campanula muralis (3) (campanule des murs):
Bref, les fleurs bleues font ce qu'elles peuvent...
On pourrait, a priori, penser qu'elles ont moins de chance d'attirer les pollinisateurs que les fleurs rouges.
Ce n'est évidemment pas le cas.
Sinon les fleurs bleues auraient depuis longtemps disparu.
Halictus scabiosae (2) sur une fleur de spirée bleue:
L'une des raisons qui font qu'elles existent encore correspond au fait que beaucoup d'insectes ne voient pas le rouge.
Alors que tous voient le bleu.
Bombylius trichurus (2) sur lavande:
Pour être bleue, une fleur doit disposer de pigments spécifiques.
On a vu que certains anthocyanes permettent à la fleur de refléter le rouge.
Pour le bleu, celle-ci doit disposer d'autres anthocyanes, ou de co-pigments flavones-anthocyanines.
Tous ces pigments (ils sont nombreux) appartiennent à la famille biochimique des flavonoïdes.
Ipomea indica (3) (volubilis bleu):
Mais, souvent, la fleur ne se contente pas de la couleur pour attirer les insectes.
Beaucoup de plantes à fleurs bleues dégagent, en plus, des arômes puissants.
Rhodanthinium infuscatum (2) sur lavande:
Apis mellifera (3) sur romarin:
La fleur a besoin de l'insecte.
L'insecte a besoin de la fleur.
Les fleurs et les insectes pollinisateurs étant tous différents, les unes s'adaptent aux autres.
Et vice versa.
Des interrelations, de types plus ou moins spécifiques, entre les butineurs et leurs plantes-hôtes, sont souvent constatées.
Elles nécessitent des centaines de millier d'années pour se développer.
La forme de la fleur, par exemple, doit correspondre à peu près aux caractéristiques anatomiques de l'insecte qui va la polliniser.
Bombylius posticus (2) sur véronique:
Certaines plantes ne dépendent que d'un nombre d’espèces réduit de butineurs.
Parfois une seule espèce.
Veronica officinalis (3) (véronique ou herbe-aux-ladres), bien que discrète, semble, au contraire, particulièrement adaptée à un grand nombre de butineurs.
Sphaerophoria sp. (3):
Platycheirus albimanus (1):
Platycheirus peltatus (2):
La plupart du temps, nous ne savons pas pourquoi certains insectes butinent certaines plantes plutôt que d'autres.
Helophilus trivittatus (2) sur buddleia:
L’analyse des interrelations entre les êtres vivants est un chantier en friche.
Quoiqu'il en soit, les fleurs bleues existent, et beaucoup se portent bien de leur couleur.
Contrairement à ce qui se passe chez les fleurs, globalement, le bleu est rare chez les animaux.
Nous sommes assez loin d'avoir une explication satisfaisante à ce fait.
Cyanistes caeruleus (3) (mésange bleue):
Les insectes ne font pas exception à la règle; ceux qui se parent de bleu ne sont pas pléthore.
En Provence, on rencontre toutefois quelques papillons bleus.
Polyommatus icarus (3) (azuré commun):
Dans certains cas, seul le mâle est bleu.
Le dysmorphisme sexuel de certaines espèces est lié à la pratique de la sexualité.
Les individus se repèrent par les couleurs.
La coloration du mâle est un signal pour la femelle.
Lysandra (Polyommatus) hispana mâle (bleu nacré espagnol):
Lysandra (Polyommatus) hispana femelle:
Chez les papillons bleus, la couleur est, comme toujours, le résultat de l'absorption de la lumière sauf le bleu, qui est réfléchi.
En ce qui concerne le rouge, plantes et insectes synthétisent des pigments spécifiques réfléchissant le rouge.
Ce n'est pas le cas pour le bleu.
Seules les fleurs synthétisent des pigments bleus.
La couleur bleue d'un insecte ne dépend pas de la présence de pigments.
Elle est, en général, le résultat de l'iridescence.
Celastrina argiolus (3) (azuré des nerpruns):
En effet, contrairement aux fleurs, la plupart des animaux sont incapables de produire des pigments bleus.
Polyommatus icarus (3) (azuré commun):
La couleur bleue chez les animaux apparaît donc à cause de l'iridescence, qui est un phénomène strictement physique.
Sans aucun rapport avec des phénomènes biochimiques.
L'iridescence est liée à certaines particularités de la surface de l'animal, qui provoquent l'irisation des couleurs.
C'est ce même phénomène que l'on constate lorsque l'eau en suspension dans l'air produit un arc-en-ciel.
Mais, dans le cas des papillons, la structure extrêmement précise des écailles limite l'irisation, et l'on n'y voit que du bleu.
A part les papillons, l'iridescence se rencontre chez d'autres groupes d'insectes.
Les odonates en particulier, chez lesquels plusieurs espèces sont bleues.
Parfois c'est le mâle, comme chez certains lycènes, qui seul se pare de bleu.
Libellula depressa (3) (libellule déprimée mâle):
Orthetrum brunneum (3) (orthétrum brun mâle):
Dans d'autres cas, le mâle et la femelle sont bleus tous les deux.
Coenagrion puella (3) (agrion jouvencelle):
On rencontre également la couleur bleue chez les guêpes bijoux.
Dans ce cas, le bleu est particulièrement "électrique", spécifique d'un bleu obtenu par irisation.
Chrysis ignita (2):
Les chrysides sont certainement les hyménoptères les plus beaux qu'il nous soit donné de rencontrer.
A part cela, le bleu reste une couleur très rare chez les insectes.
Même la mouche bleue, finalement, n'est pas très bleue.
Calliphora sp. (3) (mouche bleue):
Deux hypothèses s'opposent quant à la rareté de cette couleur chez les animaux:
-Soit le bleu représente une couleur archaïque, progressivement abandonnée au cours de l'évolution.
-Soit il représente une couleur récente, qui ne s'est pas encore très développée chez la plupart des espèces actuelles.
Bref, deux hypothèses strictement contradictoires.
Il nous faut donc accepter l'idée que nous ne savons ni pourquoi, ni depuis quand, certains animaux sont bleus.
Et, dans tous les cas, les fleurs exceptées, nous ne rencontrons guère de bleu sous nos latitudes.
Hormis le bleu du ciel.
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