Nous aurait-on menti?
En cours de sciences naturelles, il y a bien longtemps, l'un de nos professeurs, était Monsieur Coton, dont nous ignorons aujourd'hui s'il est toujours de ce monde.
Monsieur Coton auquel nous souhaitons, dans tous les cas, d'avoir, ou d'avoir eu, une vie heureuse.
Monsieur Coton, que l'un de nous deux eut quatre années entre la sixième et la terminale, dont une année en tant que professeur principal.
Monsieur Coton, qui fait partie de ces enseignants qui laissent les souvenirs les plus nombreux...
"C'est bon, tu nous lâches maintenant, on s'en fout de ton monsieur Coton".
Bref, Monsieur Coton, qui n'était pas particulièrement coton, nous avait annoncé un jour la chose suivante:
"aujourd'hui nous allons étudier quatre hyménoptères: l'eumène, l'ammophile, le sphex, et l'ichneumon".
Eumenes coronatus (2):
Nous allons étudier l'eumène, l'ammophile, le sphex et l'ichneumon!
(droits réservés)
Et bien, ce jour-là, monsieur Coton nous prit pour des blaireaux.
Car il aurait du nous dire: "les eumènes, les ammophiles, les sphex et les ichneumons".
Ou plutôt "les eumènes, les sphex, dont font partie les ammophiles, et les tas d'ichneumons".
A sa décharge, le grand Larousse illustré de notre enfance nous montrait ceci:
(droits réservés)
Et n'allait pas chercher plus loin.
Précisons un peu.
Les Sphecidae sont des sortes de guêpes, très caractéristiques car les premiers segments de leurs abdomens sont très étroits.
La famille comprend trois sous-familles essentielles:
-Ammophilinae, dans laquelle on retrouve le genre Ammophila
-Sceliphrinae, au sein de laquelle on trouve Sceliphron (qui ne devait pas intéresser monsieur Coton)
-Sphecinae, qui comporte Isodontia, et Sphex proprement dit.
Nous avions toujours remarqué quelques membres de la famille des Sphecidae dans nos jardins successifs.
Parce qu'ils nous rappelaient notre enfance, nous étions impatients de les immortaliser.
Cela ne tarda pas, et ils apparurent dès le milieu du premier printemps du blog.
Isodontia mexicana (2) (isodonte mexicaine):
Les Sphecidae sont relativement "faciles" à déterminer.
D'abord parce que l'on sait d'emblée que l'on à affaire à un Sphecidae.
Ensuite parce que les espèces sont assez distinctes (mais pas toujours) entre elles.
Voici donc quels sont les Sphecidae rencontrés dans notre jardin lors de notre première saison d'entomologie:
Palmodes occitanicus (2) (celui du Larousse?):
Isodontia mexicana (3) (isodonte mexicaine):
Isodontia splendidula (2):
En fait, nous faisons preuve ici d'un brin de mauvaise foi.
Comme souvent!
Mais cela n'est pas grave, car notre but n'est pas de proposer une taxonomie rigoureuse.
Pour cela, de nombreux sites, animés par des professionnels, sont facilement accessibles.
Nous voulons juste sensibiliser quelques-uns au respect de la biodiversité, et faire part de ce que sont les premiers pas d'un amateur en entomologie.
En réalité, Isodontia splendidula est douteux, mais il est extrêmement présent en région PACA.
Cependant, il ne s'agit pas d'une identification certaine.
Pour ce qui est de notre mauvaise foi, référez-vous à l'article intitulé "La mauvaise foi".
En tout cas, ce qui est sûr, c'est que, pour le suivant, il n'y a pas de doute possible.
Sceliphron caementarium (3):
Quant à celui-là, dans un premier temps, nous avions pensé que le "flou orangé" sur son abdomen correspondait à un défaut de la photo.
En réalité, pas du tout.
Il s'agit bel et bien d'une caractéristique de l'insecte en question.
Prionyx kirbii (3):
*
Quant aux ammophiles, dont la détermination n'est pas très aisée non plus, au moins deux espèces différentes sont présentes dans notre jardin.
Ammophila heydenii (2):
Ammophila sabulosa (2) (ammophile des sables):
Et, dans ce cas, nous ne sommes pas de mauvaise foi.
Le premier présente une coloration tirant sur le rouge au niveau du tibia de la première et deuxième paires de pattes.
Quant au second, les pattes sont entièrement noires.
Tout cela parait bien compliqué, mais est en réalité assez simple.
Les vrais difficultés en entomologie sont ailleurs.
(droits réservés)
A noter que les insectes disposent de trois paires de pattes (sinon ce ne sont plus des insectes).
Ces pattes comptent un total de 6 fémurs, 6 tibias et 6 tarses (mais aucun radius, cubitus, ulnus ou carpe).
Les entomologistes se sont contentés de faire l’analogie avec le squelette du membre inférieur de l'homme.
A noter encore: les catégories n'existent pas dans la nature.
Ce sont les hommes qui l'ont catégorisée.
Ainsi notre ulnus (anciennement humérus) pourrait s'appeler aussi bien fémur antérieur, et le tibia des insectes cubitus.
Car, si chez eux le radius manque, ils ne disposent pas non plus de péroné.
Voici (en attendant la suite) pour les Sphecidae.
Passons aux Ichneumonidae.
Les Ichneumonidae!
Grande famille lit-on.
Et pour cause: pas moins de 35 sous-familles pour 60000 espèces différentes dans le monde!
Autant dire que la taxonomie complète des Ichneumonidae n'est pas pour demain.
Ni pour plus tard, ni même pour après.
Il était finalement assez coquasse Monsieur Coton avec "son" ichneumon.
60000, pas moins!
(droits réservés)
En France, cela se réduit sensiblement.
Mais il y en a encore assez pour avoir le tournis.
On en rencontre des ichneumons, et pas qu'un seul.
Sans doute plus d'un millier d'espèces, dont la plupart n'entrent pas dans les taxonomies faute d'être connues.
Commençons par celui-ci.
Ichneumonidae sp.:
Autant dire que l'on ne sait pas de quoi il s'agit.
Heureusement, dans d'autres cas, les spécialistes connaissent la bête, et les profanes peuvent la reconnaître.
Banchus pictus (3):
Therion circumflexum (3):
Lissonota cruentator (2):
Mais ce n'est pas la règle.
Souvent nous avons galéré, pour parvenir à une identification à peine probable.
Coelichneumon deliratorius (1):
Stenichneumon militarius (1):
Syrphoctonus crassicornis (1):
Entre le parfait inconnu et les espèces identifiables, restent ceux dont on devine la famille.
Banchinae (2):
Cryptinae (2):
Et ceux dont on devine le genre.
Dicaelotus sp. (2):
Ophion sp.(2):
Mais, dans ces cas aussi, l'ombre d'un doute persiste, même si nous avons cherché beaucoup et longtemps.
A côté des Ichneumonidae, il existe une autre famille qui en est assez proche.
On en distingue les spécimens parce qu'ils disposent de tibias particulièrement "enflés" au niveau de la troisième paire de pattes.
Attention toutefois à ne pas les confondre avec des Ichneumonidae atteints d’éléphantiasis...
Mais ceci est tout de même exceptionnel.
Il s'agit de la famille des Gasteruptionidae, dont les membres sont particulièrement friands de fleurs aromatiques
Gasteruption assectator (1):
Gasteruption hastator (3):
Il ne vous a pas échappé que nous n'avons pas encore abordé jusqu'ici les eumènes.
Cela fait plaisir, il y en a au moins quelques-uns qui suivent.
Les eumènes sont assez connues, car elles construisent des nids en terre (parfois dans les maisons, derrière les livres qui ne sortent pas des bibliothèques).
On les appelle aussi les guêpes potières ou les guêpes maçonnes.
Elles ont la particularité de présenter un double étranglement au niveau des premiers segments abdominaux, ce qui leur donne un look unique.
Eumenes mediterraneus (2) (eumène méditerranéenne):
Certaines essaient de les imiter, mais elles feraient mieux d'abandonner car leurs efforts sont pathétiques:
(droits réservés)
A noter que, si les eumènes apprécient les fleurs, et pour cause, elles ne portent par contre jamais de petites culottes.
Eumenes sp. (3):
Il existe une petit dizaine d'espèces d'eumènes en Europe.
Elles sont toutes ressemblantes et difficiles à déterminer.
Eumenes mediterraneus (1):
Eumenes coarctatus (1):
Eumenes pomiformis (1):
Les différences sont subtiles: points jaunes sur le thorax, segments jaunes au niveau de l'étranglement abdominal...
Il y a vraiment de quoi douter, et l'on peut parier qu'aucun site sérieux ne validerait les déterminations ci-dessus.
Nous nous sommes lancés, mais à tâtons, et au risque de l'opprobre.
Pour l'instant, nous en avons fini avec L'eumène, LE sphex, L'ammophile, et surtout L'ichneumon.
Nous y reviendrons.
Cela nous a coûté du temps et de l'énergie en termes de détermination.
C'est en particulier avec ces espèces que nous avons compris qu'il nous serait impossible de donner un nom à tout.
Alors même que l'insecte est là, à notre portée, posé sur une fleur du jardin.
Merci à vous Monsieur Coton, et à tous nos professeurs de sciences naturelles.
Quarante ans plus tard, il reste quelque chose de votre enseignement.
Nos sorties écologiques furent un vrai plaisir.
En ces temps-là, il est vrai, la vie était plus simple.
Et surtout, il n'y avait qu'UN ichneumon.
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