LE JARDIN DE CHOUI ET LEIA

LE JARDIN DE CHOUI ET LEIA

Métaphysique des mouches

Dans le bestiaire du Christ, les mouches sont associées à Satan, que l'on appelle aussi le Dieu des mouches.

C'est dire qu'elles n'ont jamais eu une extraordinaire réputation.

Et cela dure depuis longtemps.

Les mouches ont tendance à être attirées par les odeurs pestilentielles, qui éloignent les autres insectes.

Les mouches apprécient les déchets, les viandes avariées, les excréments, la mort...

Diaboliques!

Calliphora sp. (mouche bleue) (3):

 

IMG_1008.JPG 

 

Si l'on y réfléchit bien, cette détestation est assez surprenante.

Les mouches sont, en effet, les insectes qui nous accompagnent le plus.

Les rares qui vivent à l'intérieur de nos maisons sans nous faire peur.

Ni jamais nous piquer.

Elles nous agacent parfois.

 

images.jpg

(droits réservés)

 

Mais cela ne va guère plus loin.

Et cependant nous les détestons...

D'où nous vient cette propension à détester ainsi ce qui nous est voisin?

 

Souvent les hommes ont peur de ce qu'ils connaissent mal.

Mais ils ne haïssent que ce qu'ils connaissent bien.

 

Connaissons-nous vraiment les mouches?

Pour la plupart d'entre nous, une mouche ressemble à ceci.

Musca domestica (mouche domestique) (3):

 

MUSCIDAE Musca domestica 4.JPG
 

Pourtant, parfois, une mouche ressemble à cela.

Ectophasia crassipennis (3) (phasie crassipenne):

 

TACHINIDAE Ectophasia crassipennis 2.JPG

 

Ou encore à cela.

Trichopoda pennipes (3):

 

TACHINIDAE Trichopoda pennipes 2.JPG

 

Qui peut se vanter d'avoir vu, un jour, Ectophasia crassipennis ou Trichopoda pennipes?

Cependant, si l'on regarde vraiment autour de soi, on finit obligatoirement par les rencontrer.

Simplement, l'immense majorité des mouches vivent à l'extérieur, dans nos jardins.

Pour les voir, il faut toutefois être attentif.

Limnophora obsignata (3):

 

MUSCIDAE Limnophora obsignata 2.JPG

 

Mais, si l'on insiste un peu, on en voit plein.

Pegomya transversa (2):

 

ANTHOMYIIDAE Pegomya sp..JPG

 

Souvent très surprenantes.

Metopia argyrocephala (3):

 

SARCOPHAGIDAE Metopia argyrocephala.JPG

 

Peleteria rubescens (3):

 

TACHINIDAE Peleteria rubescens 2.JPG

 

Les mouches qui précèdent sont très différentes les unes des autres.

Et toutes sont assez caractéristiques.

Mais, en fait, pourquoi les mouches sont-elles différentes entre elles?

Pourquoi certaines se parent-elles de couleurs, quand d'autres sont grises?

Une des explications fournies est que certains insectes se parent de couleurs voyantes pour signaler à leurs éventuels prédateurs qu'ils sont immangeables.

Cylindromia auriceps (3):

 

TACHINIDAE Cylindromyia sp. 2.JPG

 

D'autres de couleurs ternes pour se cacher.

Pollenia rudis (2) (mouche des greniers):

 

CALLIPHORIDAE Pollenia rudis 5.JPG

 

Cela n'explique certainement qu'une infime partie du problème.

Une approche anthropomorphique pourrait nous laisser supposer que les insectes se parent différemment afin que nous puissions les distinguer les uns des autres.

Là, nous sommes loin de la réalité...

 

Par ailleurs, que penser des mouches qui sont petites, peu colorées, difficiles à identifier et à photographier?

Paragus pecchiolii (2):

 

SYRPHIDAE Paragus pecchiolii 1.JPG

 

Azelia cilipes (1):

 

MUSCIDAE Azelia sp..JPG

 

La seule chose sûre est que les mouches ne sont pas ce qu'elles sont dans le seul but de nous emmerder.

 

Les insectes en général, les mouches en particulier, correspondent à un univers qui nous est contigu.

Mais que, sauf exception, nous ne voyons pas.

Les marges de ces deux univers sont constituées par les entomologistes d'un côté, les mouches domestiques de l'autre.

Les premiers observent les mouches.

Les secondes nous tiennent compagnie.

Les deux constituent des ponts entre deux mondes qui, sans eux, s'ignoreraient complétement.

 

Pourquoi existe-t-il des mouches?

Sarcophaga africa (3):

 

SARCOPHAGIDAE Sarcophaga africa 3.JPG

 

Nous savons répondre à cette question.

Il existe des mouches parce que nous existons.

Ou, plus exactement, il existe des mouches parce que sans elles nous n'existerions pas.

En effet, du fait de leur énorme biomasse, les mouches représentent un élément essentiel des chaines alimentaires.

De plus, les mouches éliminent les cadavres, les déchets divers, et produisent l'humus.

Mais, si l'on y réfléchit bien, notre réponse est biaisée.

Avec ce type de questionnement commence la métaphysique des mouches...

 

Pourquoi existe-t-il autant de mouches différentes?

Stomorhina lunata (3):

 

CALLIPHORIDAE Stomorhina lunata 4.JPG

 

Nous sommes incapables de répondre à cette question.

Nous touchons là aux mystères de l'évolution et de la spéciation.

La plupart des familles de mouches sont spécialisées.

Certaines, comme les Xylomidae, sont xylophages (d'où leur nom).

Solva marginata (3):

 

XYLOMYIDAE Solva marginata.JPG 

 

D'autres, comme les syrphes, sont floricoles.

Xylota segnis (2) (xylote indolente):

 

SYRPHIDAE Xylota segnis 1.JPG

 

Les larves d'autres familles, comme les Agromyzidae, sont des larves mineuses, qui se nourrissent de plantes.

Ophiomyia nasuta (2):

 

AGROMYZIDAE Ophiomyia sp. 2.JPG

 

Les Opomyzidae sont inféodées aux graminées.

Leurs larves sont phytophages, et elles peuvent causer des dégâts sur certaines cultures

Opomyza florum (2):

 

OPOMYZIDAE Opomyza florum.JPG

 

Ainsi, certaines familles de mouches ont pu être considérées comme nuisibles.

Nuisibles!

La notion d'insectes nuisibles, en vogue au début du XX° siècle, parait bien désuète aujourd'hui.

Les écosystèmes qui nous entourent recèlent une complexité telle que nous n'avons qu'une infime idée du nombre d’interactions établies entre les espèces.

Les équilibres que nous constatons repose sur des millions d'années d'évolution.

Un peu plus de ceci, un peu moins de cela, et tout vacille.

 

L'entomologie est une science complexe.

Hélas, les entomologistes professionnels sont peu nombreux.

De fait, la plupart des familles de mouches sont méconnues.

Et la connaissance que nous avons de leurs modes de vie très imparfaite.

Mais, dans de nombreux cas, nous nous y retrouvons à peu près.

 

Les Therevidae, par exemple, sont des mouches pollinisatrices.

Elles se nourrissent aussi d'excrétions animales.

Mais leurs larves sont entomophages, donc prédatrices.

Thereva plebeja (3):

 

THEREVIDAE Thereva plebeja 3.JPG
 

Les Rhagionidae sont des mouches prédatrices, et certaines d'entre elles sont hématophages.

Chrysopilus cristatus (3) (chrysopile doré):

 

RHAGIONIDAE Chrysopilus cristatus.JPG

 

Chrysopilus asiliformis (2):

 

RHAGIONIDAE Chrysopilus asiliformis 1.JPG

 

Les Heleomyzidae se nourrissent de matières organiques en décomposition et de champignons.

Suillia gigantea (3):

 

HELEOMYZIDAE Suillia gigantea.JPG
 

Suillia variegata (2):

 

HELEOMYZIDAE Suillia variegata 1.JPG 

 

Les Sepsidae, elles, sont souvent coprophages.

Sepsis fulgens (3):

 

SEPSIDAE Sepsis fulgens.JPG

 

Les Phaeomyiidae représentent une petite famille proche des deux précédentes.

Pelidnoptera nigripennis (1):

 

PHAEOMYIIDAE Pelidnoptera nigripennis.JPG 

 

Etc, etc.

 

Toutes ces familles se distinguent par des modes alimentaires variés.

Et s'inscrivent dans une superstructure dont nous ne sommes pas près de comprendre les tenants et les aboutissants.

Nous connaissons les mouches, mais finalement nous les connaissons mal. 

D'ailleurs, la plupart des espèces de mouches ne disposent pas de nom vernaculaire.

Alors que presque tous les papillons ont le leur.

 

Certes, nous savons, depuis peu, que les mouches dorment la nuit.

 

canstock23452529.jpg

(droits réservés)

 

Certaines font même la sieste au soleil.

Anthrax trifasciatus (3):

 

BOMBYLIIDAE  Anthrax trifasciatus 5.JPG

 

Et, si on les dérange pendant celle-ci, elles dormiront plus la nuit suivante.

Cela est bel et bien, mais ne nous fait pas mieux comprendre les mouches.

Car nous ne sommes même pas capables de comprendre le fonctionnement du sommeil humain.

 

Il existe plus de 6500 espèces de mouches en France.

Evidemment, l'on ne sait pas pourquoi il en existe autant.

Ce nombre explose si l'on s'intéresse aux zones tropicales.

 

Certes, le fait que les mouches soient si nombreuses fait la joie des entomologistes amateurs.

Xanthogramma dives (3):

 

SYRPHIDAE Xanthogramma dives 2.JPG

 

Pyrellia vivida (2):

 

MUSCIDAE Pyrellia vivida 3.JPG

 

 

Mais à part cela?

Ce qui est certain, c'est que chaque espèce tient son rôle.

Que beaucoup sont essentielles.

Que leur disparition pourrait avoir des conséquences catastrophiques.

 

Pourtant, nous détruisons les mouches.

Directement ou indirectement.

Nombre d'activités humaines massacrent la biodiversité.

Tachina fera (2) (tachinaire hérissonne):

 

TACHINIDAE Tachina fera 2.JPG

 

On appelle cela l'anthropocène.

Cleonice callida (1):

 

TACHINIDAE Cleonice callida 1.JPG

 

L'âge de l'homme qui, par sa seule présence sur la planète, modifie radicalement les écosystèmes.

Comment avons-nous acquis ce pouvoir?

Pourquoi l'utilisons-nous?

Autres questions métaphysiques pour l'instant sans réponses...

 

 

 



17/08/2019
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